Statistiques de la délinquance : nouvelle méthodologie de calcul

Service statistique de la délinquance

Service statistique de la délinquance

Depuis des années les chiffres de la délinquance (atteintes aux biens et aux personnes, crimes et délits etc) font l’objet de la publication de rapports annuels par l’ONDRP (Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales). Ces statistiques sont établies en croisant une multitude de sources de données ce qui rend l’exercice complexe. Les cambriolages par exemple ne sont pas chiffrés de la même manière selon que l’on consulte les victimes, les forces de l’ordre ou encore les juges. Il existe un écart énorme entre les cambriolages effectifs, les plaintes réellement déposées, les cas traités et ceux qui aboutissent à une décision de justice. Comme pointé du doigt sur le site de l’INSEE  l’interprétation des statistiques à des fins politiques pose un réel problème dans leur établissement… Par extension c’est l’exactitude même des chiffres qui est parfois sujette à caution.

C’est pourquoi, le gouvernement a mis en place en 2013 sous l’égide d’Emmanuel Valls une refonte totale du système de traitement et de publication des statistiques de la délinquance. Le 1er septembre Bertrand Cazeneuve a poursuivi dans cette voie en annonçant le lancement d’un Service Statistique Ministériel de la sécurité intérieure. Jusqu’ici l’ONDRP qui publiait les statistiques officielles de la délinquance dépendait du ministère de l’intérieur. Le SSM (Service Statistique Ministériel) sera quant à lui et en théorie un organisme absolument indépendant. A partir de 2015, il publiera ses statistiques mensuelles sans l’aval du ministre. Le nouveau mode de calcul et l’indépendance du SSM est censé garantir une totale transparence des chiffres et une plus grande exactitude.

Cazeneuve installe un service statistique dans son ministèreLe SSM sera composé de spécialistes majoritairement issus de l’INSEE. Leur président, François Clanché, inspecteur général de l’INSEE annonce des modifications dans le mode d’évaluation et la prise en compte des statistiques. Le SSM va principalement s’appuyer sur les sondages annuels INSEE auprès des foyers et complétera ces données des chiffres de la police et de la gendarmerie. Ces derniers chiffres seront pondérés afin d’atténuer leur imprécision.

Ce détachement de l’outil statistique de l’appareil ministériel et la refonte des modes de calcul devrait selon M Cazeneuve mettre fin “à la « politique du chiffre », pratique contestable et simpliste au plan de la conduite de la politique publique de sécurité.” (voir l’article)

On ne peut que louer cette initiative mais il faudra attendre encore un peu pour juger de l’efficacité de ce nouvel outil…

Ce n’est pas en cassant le thermomètre qu’on fait tomber la fièvre

(Ajout du 21 novembre 2014)

Intuition ou coincidence ? Le 18 novembre je publiais l’article ci-dessus sur la nouvelle méthodologie de calcul appliquée aux cambriolages et de manière plus générale à l’ensemble des crimes et délits. Le lendemain de cet article, le Premier Ministre Manuel Valls et le Ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve annoncent en fanfare une baisse significative des chiffres.

Les cambriolages auraient baissé de 4.3 % en France cette année !

Correction…. Il s’agit des chiffres des cambriolages des seules résidences principales. Les cambriolages de résidences secondaires auraient quant à eux augmenté de 7 %. Etrangement cette deuxième information a été passée sous silence.

Outre ce saucissonage des chiffres, il est étonnant de constater que :

  • que cette annonce intervient alors que l’année 2014 n’est pas terminée et concernerait donc des chiffres sur 12 mois glissants, ce qui n’est pas l’usage d’ordinaire,
  • la célérité avec laquelle un SSM (Service Statistique Ministériel) constitué depuis deux mois a pu compiler et traiter des données aussi complexes,
  • l’inversion soudaine et brutale d’une tendance qui existait depuis des années,
  • l’écart qu’il existe entre ces nouveaux chiffres et les chiffres qui auraient été ceux constatés si la méthode de calcul de l’ONDRP avait été reprise (au mieux une stagnation du nombre des cambriolages selon les sources journalistiques).

Tout cela ressemble quand même beaucoup a un exercice de communication politique et l’indépendance annoncée du SSM (organisme installé au sein même du Ministère de l’Intérieur) semble d’ores et déjà avoir du plomb dans l’aile.
Alain

Ce message a été écrit par : Alain

Féru de nouvelles technologies et travaillant dans un secteur proche de la sécurité domestique, j'effectue une veille constante sur internet afin de partager les informations pertinentes sur les systèmes d'alarme.

One commentaire

  1. La politique est assez forte pour cacher les augmentations négatives, il faut toujours savoir lire entre les lignes ! Il existe plusieurs rapports de ce genre, d’ailleurs, les études de marché faites par des cabinets permettent parfois d’avoir des chiffres plus réels que ceux donnés par l’Etat. Merci pour ces informations qui vont me permettre d’éviter d’avoir des chiffres erronés pour mes études.

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